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communes, mais point de centralisation ; allons jusqu’au bout, un État dont les parties reconnues souveraines auraient la faculté de sortir du groupe et de rompre le pacte, ad libitum. Car il ne faut pas se le dissimuler : la fédération, pour être logique, fidèle à son principe, doit aller jusque-là, à peine de n’être qu’une illusion, une vanterie, un mensonge.

Mais il est évident que cette faculté de sécession qui, en principe, doit appartenir à tout État confédéré, est contradictoire ; elle ne s’est jamais réalisée, et la pratique des confédérations la dément. Qui ne sait qu’à l’époque de la première médique la Grèce faillit périr, trahie par sa liberté fédérale ? Les Athéniens et les Spartiates se présentèrent seuls contre le grand roi : les autres avaient refusé de marcher. Les Perses vaincus, la guerre civile éclata entre les Grecs pour mettre fin à cette constitution absurde ; ce fut le Macédonien qui en eut l’honneur et le profit. — En 1846, lorsque la confédération Suisse fut au moment de se dissoudre par la sécession des cantons catholiques (Sunderbund), la majorité n’hésita point, pour ramener les scissionnaires, à employer la voie des armes. Elle n’agit point alors, quoi qu’on ait dit, en vertu du droit fédéral, qui était positivement contre elle. Comment les treize cantons protestants, tous souverains, auraient-ils prouvé aux onze cantons catholiques, tous également souverains, qu’ils avaient le droit, en vertu du pacte, de les contraindre à l’Union dont ceux-ci ne voulaient plus ? Le mot de fédération jure contre une prétention pareille. La majorité helvétique agit en vertu du droit de conservation nationale ; elle considéra que la Suisse, placée entre deux grands États unitaires, ne pouvait,