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vent à chaque instant, mais qui conserve pour l’intelligence des masses le plus d’équivoque. Le peuple le prend le plus souvent en un sens qui n’est ni celui des affaires, ni celui de l’économie politique, qui, par conséquent, n’est pas davantage celui de la mutualité. Cela vient de ce que la langue économique n’a pas été faite par des savants, comme celles de la Chimie et du Droit, mais par des praticiens sans lettres, sans philosophie, prenant au sens d’une prestation bienveillante ce qu’il fallait entendre d’une transaction intéressée, confondant ainsi les notions les plus contraires, et finissant par parler une sorte d’argot plutôt qu’un langage rationnel.

Crédit est un mot latin francisé, credit-us, ou credit-um, participe passif, masculin ou neutre, du verbe credo, qui signifie également croire et confier. Vendre à crédit est une phrase de basse latinité, comme qui dirait, vendre à qui est cru, ou vendre à confiance, c’est-à-dire sur la promesse du chaland d’un payement ultérieur. Prêter à crédit, par la même raison, est prêter, non pas sur caution ou gage, mais sur l’espoir de restitution. Crédit est donc confiance : à l’ori- gine on ne l’entendit pas autrement..

Maintenant, c’est autre chose : le crédit n’exprime nullement la confiance, malgré tout ce que disent les usuriers de l’époque. C’est une opération essentiellement mercantile et intéressée, par laquelle des individus qu’on nomme capitalistes ou marchands, font à d’autres qui en ont besoin et qu’on appelle acheteurs ou emprunteurs, l’avance de leurs