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YVETTE PROST

L’homme, pensif, regardait attentivement à ses pieds les champs de fleurs et les beaux arbres du domaine Pomponiana. Pour la dixième fois peut-être, il arrivait à la croisée des chemins de la Font-des-Horts et de Saint-Pierre-d’Almanarre. Il consulta sa montre et soupira : « Elle n’a pas pu venir. Inutile d’attendre plus longtemps ».

Le petit garçon leva sa frimousse éveillée :

— Qui donc, papa, qui a pas pu venir ?

— Rien… Ne pose donc pas tout le temps des questions.

— Depuis le temps qu’on est dans ce chemin, c’est pas amusant. Viens donc voir la mer !

Le jeune homme hésita une seconde, regarda une fois de plus sa montre : « Trop tard… » Pour contenter son fils, il redescendit vers le golfe bleu qui scintillait sous le soleil déclinant. Lorsqu’ils atteignirent la route de Toulon, l’enfant grimpa sur le parapet de pierre et demeura un moment en contemplation.

— Papa, cette mer-là, est-ce qu’elle est aussi grande que le Pacifique ?

— Non, mon petit ; elle est beaucoup, beaucoup moins grande.

— Tu l’avais déjà vue, toi ?

— Oui, je l’avais déjà vue… Descends : il est temps que tu ailles te reposer.

Ils reprirent leur chemin et les questions se poursuivirent :

— Papa, est-ce que tu étais déjà venu juste dans cet endroit-là ?

— Oui, j’y suis venu lorsque j’avais ton âge.

— Tu étais aussi avec ton papa.

— Non, j’étais avec maman.