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LE COUPLE AU JARDIN

à l’invitée de sa belle-mère le capitaine Aulnoy — laid, mais très chic — et dit en souriant à l’officier :

— Madame Diane Horsel, l’enchanteresse des lecteurs du Courrier du Var, qui fait baisser le tirage de tous les autres journaux du département.

Il sembla à Nérée que la belle journaliste avait eu un demi-sourire crispé. Soupçonnait-elle quelque ironie dans les paroles de Blanche ? Avec une parfaite délicatesse, il précisa que Mme Horsel ne collaborait au Courrier que pour occuper un court repos entre deux brillants reportages. Et il rappela les enquêtes presque héroïques qu’elle avait faites en Espagne.

Le capitaine salua et resalua. Mais ces titres de gloire ne l’intéressaient pas. Héros lui-même, il ne désirait point trouver chez les femmes des émules et des rivales, mais des êtres de grâce et de tendresse, propres à embellir les douces haltes. À ses yeux, Blanche réalisait en perfection cet idéal et, sans arrière-pensée, il s’enchantait de ce délicat visage féminin.

Mme Mère n’avait rien négligé pour assurer l’excellence de ce dîner. Fine, cuisinière émérite, avait déployé tous ses talents ; le meilleur pâtissier d’Hyères avait été prié de se surpasser et de vénérables bouteilles étaient sorties de la cave. Les cristaux et la vieille argenterie étincelaient sur la nappe semée de roses.

Dans la maison Galliane, tout rendait un son plein. Aucun sacrifice à la vanité ; rien de frelaté, rien d’artificiel ; tout se révélait authentique, sincère et du meilleur aloi, depuis le solide mobilier Louis-Philippe, depuis le camée qui fermait le col de dentelle de la vieille maman, depuis la carnation de fleur de la jeune femme jusqu’au bouquet de ce vin dont