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YVETTE PROST

— J’ai l’impression toute contraire.

— Il m’intimide singulièrement.

— Il intimide tout le monde ; tu t’habitueras à lui.

De subtiles nuances dans l’attitude de son beau-père préoccupaient Nérée. Cet homme, qu’il savait autoritaire et cassant, observait à son égard une douceur qu’on eût dite presque craintive. En lui parlant, il évitait de le regarder en face et, lorsqu’il lui donnait la main, le jeune homme sentait cette main frémissante, impatiente de se dérober.

Secrètement attristé, le gendre se demandait : « Est-ce que je lui inspire une antipathie insurmontable ? Ou ne me pardonnera-t-il jamais de lui avoir pris sa fille ? »

Lorsque le docteur parla de quitter l’hôpital, Nérée proposa :

— Venez achever votre guérison chez nous. Vous y trouverez un repos idéal, dans l’air marin, à l’ombre des arbres. Blanche sera auprès de vous sans cesse ; moi, je vous promènerai en bateau dans les calanques…

Le visage sévère laissa voir un bref attendrissement :

— Ce programme est bien tentant ; mais il n’est pas réalisable. Il est urgent que je rentre chez moi. Jollier se surmène à contenter ma clientèle et la sienne. Je ne veux pas le mettre sur le flanc.

Et Nérée, tristement déçu, se dit : « Il n’a pas désarmé. Je dois perdre l’espoir de le voir jamais dans ma maison. »

Ce même soir, le ménage Galliane eut un grave entretien avec le docteur Jollier. Blanche exigeait des