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LE COUPLE AU JARDIN

« Une âme d’une certaine trempe forge et modèle le corps qu’elle anime. »

Cette impression allait s’affirmer de jour en jour et surtout lorsque le convalescent fut debout, sensiblement amaigri, mais plus droit que jamais. Blanche disait à Nérée :

— Il me semble que mon père a grandi. Il s’est encore spiritualisé : il est devenu la statue de lui-même.

Nérée n’avait eu garde de prolonger la première entrevue. Lorsque sa femme l’eut reconduit jusqu’à sa voiture, ils s’étreignirent en silence, leur émotion ne trouvant pas de paroles.

Enfin, quand le jeune homme eut pris sa place au volant et que Blanche se pencha pour un dernier baiser :

— Tu me promets d’être tranquille maintenant ? pria-t-il, puisque la guérison est certaine.

— Oui, l’affreux cauchemar est fini. Comme toujours, c’est toi qui avais raison.

— Ce n’est pas moi qui avais raison, mon amour, mais l’espérance.

Le docteur Ellinor, qui reprenait rapidement ses forces, avait exigé que sa fille retournât auprès de son mari et de son enfant. Mais Blanche passait à l’hôpital la plus grande partie de l’après-midi : et Nérée. un peu avant l’heure du dîner, la venait chercher.

Ellinor accueillait son gendre avec une grâce courtoise et l’écoutait avec une extrême attention. Entre eux, pourtant, subsistait une sorte de gêne qui ressemblait à la timidité.

Nérée demandait avec inquiétude à sa femme :

— Crois-tu que je déplaise à ton père ?