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YVETTE PROST

peine la silhouette de l’unique promeneur. Le cœur battant, elle se hâtait vers cette ombre. Que lui dirait-elle ? Elle n’en savait rien ; mais il lui semblait impossible que leur rencontre, à cette heure et dans ce décor, ne fût pas émouvante.

Nérée, parvenu au terme habituel de ses promenades avec Blanche, fit automatiquement demi-tour. Aussitôt, il distingua la promeneuse qui venait en sens contraire. Il éprouva un assez vif déplaisir. Il regrettait que sa méditation solitaire fût troublée, et, surtout, sa délicatesse s’offusquait de ce tête à tête nocturne, en l’absence de Blanche, avec une femme séduisante et coquette.

Lorsqu’ils se trouvèrent face à face, Diane s’écria avec une légèreté affectée :

— Ah ! cher monsieur, quel soulagement lorsque je vous ai reconnu ! J’avais presque peur, savez-vous ?

Il répondit assez froidement :

— Un malfaiteur n’aurait vraiment pas grand’chose à faire sur cette bande de sable déserte. Au reste, si vous aviez peur, il me semble que, lorsque vous m’avez aperçu, vous aviez largement le temps de retourner chez vous.

— C’est, en effet, ce que me conseillait la prudence. Mais j’écoute rarement cette voix sage. Ma folie incorrigible est d’espérer toujours quelque merveilleux imprévu.

— Eh bien ! le hasard vous a mal servie ce soir.

Le ton était d’une sécheresse inaccoutumée. Diane, un instant interdite, se demandait si elle avait eu tort de venir. Mais non, non, elle n’avait jamais tort et ne regrettait rien. Après quelques pas en silence, elle dit d’une voix émue :