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YVETTE PROST

que prier. Mais Dieu ne finira-t-il pas par m’entendre ?… »

Quelques heures plus tard, dans la chambre grande ouverte sur la terrasse, Blanche, après avoir couché son fils, s’occupait à quelques rangements. Ses mains légères vérifiaient les piles de beau linge blanc dans l’armoire, l’alignement des vêtements dans la garde-robe, la netteté des objets de toilette dans la salle de bain… Elle savait que l’ordre matériel autour de nous ne manque jamais d’apporter quelque sérénité dans notre âme troublée. Et, chaque fois qu’elle passait près du petit lit où dormait Pomme, elle se penchait avec une tendresse passionnée sur la tête charmante.

Nérée, qui rêvait seul sur la terrasse, appela doucement :

— Ma chérie, viens donc un peu avec moi !

Il l’attira dans le large fauteuil adossé à la balustrade et, lorsqu’il l’entoura de son bras, le corps mince lui sembla diminué, d’une fragilité inquiétante.

Pourtant il se tut. Il sentait Blanche inquiète, un peu tremblante. En la serrant contre lui, il pensait :

« Tu as peur de moi, mon pauvre amour ! Peur de mes questions, de ma jalousie peut-être… Eh bien ! rassure-toi : je ne te demanderai rien. Aussi pénible que soit le silence, je ne te demanderai rien. J’attendrai avec patience que tu me connaisses mieux encore, que tu m’aimes encore mieux ; et c’est toi qui ne pourras plus supporter de te taire et qui m’ouvriras toute ton âme — ton âme, dont je ne veux, dont je ne peux pas douter ! »

Étroitement enlacés, ils laissaient la brise calmante soulever leurs cheveux ; et Blanche sentait avec émotion, contre son bras, le battement bien rythmé du