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YVETTE PROST

Les Saby, qui vivaient « dans le nord », c’est-à-dire à Blois, avaient fait un crochet, au cours d’un voyage à Nice, pour embrasser l’ami Nérée. C’étaient des gens charmants, très expansifs, répondant beaucoup mieux que Galliane au type conventionnel du Méridional ; et ils étaient visiblement heureux de se trouver là.

Mme Horsel, en beauté dans une robe fleurie, s’épanouissait d’aise, d’autant que la jeune Mme Saby n’était pas jolie et que Blanche, très exceptionnellement, avait le teint un peu terne et les traits tirés.

Inévitablement, les deux anciens camarades de jeux et d’études évoquaient les souvenirs et les visages de leurs jeunes années. Des noms presque oubliés leur revenaient aux lèvres :

— Et Max Guillot, l’as-tu revu ?

— Jamais… Et sais-tu ce que devient ce grand fou de Rollier ?

— Un grave magistrat. Il est juge d’instruction à Châteauroux.

— Et Georges Bard ? questionna Nérée. La dernière lettre que je lui écrivis est restée sans réponse.

— Pauvre Bard ! Il ne doit pas être très disposé aux épanchements épistolaires. Tu ne sais donc pas son histoire ?

— Je ne sais rien de lui depuis son mariage, qui eut lieu peu de temps avant le mien.

— Eh bien ! les Bard sont maintenant en instance de divorce. C’est une histoire triste et absurde. Cela commença comme les romans archi-usés : le patron qui épouse sa dactylo. Mais je crois qu’il s’agissait vraiment d’un grand amour réciproque, et, comme tout grand amour, un peu trop exigeant, un peu chiméri-