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enfin, on est à la fois saisi et frappé d’interdiction. Si vous avez la force d’entrer dans ces sentiers qui séparent les tranchées, montez jusqu’aux dates de juin, juillet 1851, vous vous trouverez stupéfait, presque anéanti, vos sens se glaceront de surprise. Des figurines représentant des anges suppliant le ciel, des Vierges répandant des bénédictions, vous les voyez partout, dans des châsses, dans les jardins entourés de fleurs, quelquefois abritées du soleil par des acacias boule ou des saules pleureurs ; les rosiers du Bengale s’efforcent d’embellir, d’égayer ce funèbre séjour. Analyser tout ce qui mériterait de l’être, c’est impossible ; seulement disons qu’il ne faut pas désespérer de la religion en France. Aujourd’hui 26 septembre 1852, j’y suis venu pour consigner quelques remarques que je pourrai faire, puisque je ne me suis pas engagé de ne point parler de cette intéressante multitude. Il est huit heures du matin, j’ai commencé par les deux décès sus-mentionnés, j’entre au milieu des nombreux sillons : j’aperçois une femme qui arrange des fleurs ; plus haut je rencontre trois jeunes filles vêtues de noir qui ont l’air de chercher quelqu’un ; un homme s’en retourne avec un arrosoir vide ; plus loin, un second tire une ficelle de sa poche pour attacher une couronne blanchi à une vingtaine d’autres. A quelques pas en redescendant, j’entends ! As-tu une vis ? en voilà une, où est le marteau ? C’étaient deux jeunes gens en blouse, qui réparaient un entourage, à genoux par terre, ne craignant point la rosée ; je rencontre un autre