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le wagnérisme en france avant la guerre

nement, il fallut bien s’incliner. Pendant plusieurs soirées, l’Opéra et ses abords furent gardés militairement ; police au dehors et police dans la salle assurèrent des représentations, d’abord tumultueuses, mais qui ne tardèrent pas à devenir paisibles et à se dérouler régulièrement.

Il était grand temps, en vérité. En province, dans les mois de février et mars, Nantes, Lyon, Angers, Bordeaux avaient devancé Paris ; et le 29 avril, Lohengrin, connu à Santiago de Chili depuis le mois de décembre 1889, était représenté à Mexico : « Qu’on le donne à Paris, demandait Johannes Weber, et puis qu’on n’en parle plus ! » Le même critique prévoyait que si Lohengrin se maintenait à l’Opéra, on devrait couper les deux premières scènes du second acte. On n’a pourtant jamais osé pratiquer une telle coupure à l’Opéra, où toute cette partie de Lohengrin qui peut devenir si intéressante avec de bons artistes, a toujours été chantée non sans une certaine mollesse…

« Et maintenant, Messieurs les wagnériens vont-ils, pour quelque temps, nous laisser un peu de tranquillité ? » demandait M. Arthur Pougin dans le sénile Ménestrel, dont le directeur, M. Heugel (Moreno), écrivait, le 4 novembre : « Lohengrin a été une déception pour les Parisiens, et cela devait être. Cet opéra n’a rien de subversif et suit, la plupart du temps, les sentiers battus… Il fallait laisser Lohengrin à la province et, par un coup d’audace, trancher de suite dans le vif, en nous donnant Parsifal ou la Walkyrie. Un souffle d’art nouveau eût alors passé sur Paris, et, au milieu des ennuis incommensurables, inhérents à toute œuvre de Wagner, au