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la question wagner depuis la guerre

« Si les œuvres de Wagner ne doivent plus être représentées, avec quelles pièces de résistance françaises ou étrangères les remplacera-t-on au répertoire ? »

Question agréable aux espoirs des compositeurs français, si souvent déçus, et qui provoqua d’assez nombreuses réponses. Si M. Paul Dukas jugeait « toute discussion à ce sujet intempestive » ; si M. Widor déclarait : « La parole est au canon », M. Georges Huë croyait à « la faillite momentanée du répertoire wagnérien ; mais on y reviendra forcément. On ne peut pas plus rayer Wagner de la musique que Rembrandt de la peinture ». Camille Erlanger, de même, déclarait que « le répertoire wagnérien appartient à l’histoire qui en décidera ». M. Silvio Lazzari critiquait fort notre théâtre « national » qui « se trouve aujourd’hui devant le Néant, s’il renonce à Wagner ».

M. Paul Vidal opinait raisonnablement que le succès de l’œuvre de Wagner ne serait pas grandement modifié par la guerre. « Les poilus musiciens sont plutôt wagnériens. »

M. Alfred Bruneau, tout en se gardant de prédire l’avenir, affirmait cependant : « Ce qui me paraît évident, c’est la faillite du wagnérisme et la renaissance, dans les sujets et dans les musiques d’opéra, de la tradition française, fortifiée par le beau et nécessaire mouvement évolutif des idées. Je suis tranquille sur ce qui pourra remplacer Wagner. »

Tout le monde ne pouvant partager le robuste optimisme de l’auteur de Messidor, d’autres refusaient, comme Cl. Debussy, d’entrer dans le royaume falot des suppositions gratuites, ou, comme M. d’Indy,