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il nous semblait possible de mettre en relief toutes ses ressources, et surtout de déployer cette naïveté qui doit être, sans doute, dans la pensée, avant de passer dans la forme, mais à laquelle certaines langues paraissent se prêter plus docilement. Le conte n’est pas un vain jeu de l’esprit ; il doit être un enseignement. Plus il est léger en apparence, plus il doit être sérieux en réalité. Il a bercé notre enfance ; il a peut-être, malheureusement contribué à égarer notre jeunesse ; car notre langue est trop riche en ces conceptions d’une frivole légèreté et d’une élégante corruption. Nous aurions été heureux que la langue patoise nous eût montré qu’il est possible d’être intéressant, sans placer sous les yeux des tableaux dont l’immoralité fait le fond, et d’être neuf, sans avoir besoin de chercher dans les raffinements d’une débauche d’esprit, quelque chose qui puisse piquer la curiosité, et la satisfaire.

Les essais ne nous ont pas manqué. Ils sont faibles en général par le sujet. Il s’agissait de créer ; et la création, quelque peu importante qu’elle paraisse, demande toujours un effort de l’esprit, car elle est une manifestation de puissance. Nous avons été dédommagés dans quelques pièces, de la faiblesse du fond, par la richesse, la variété et le charme de la forme. Sans doute, nous avons plus d’une fois constaté l’influence du français sur une langue dont le génie est si différent ; mais en général, il y a eu effort pour se tenir en garde contre ce danger, et se soustraire à cette influence. C’est une preuve de goût, et nous en félicitons nos concurrents.

Deux pièces ont attiré l’attention de la commission. La première est intitulée : Lou paysan médéci. Le dialecte est fort différent du nôtre, et ce n’est qu’après une longue étude, qu’il nous a été possible de nous rendre compte de tout, et d’apprécier les détails. Il y en a de charmants. Le style est net, franc, d’une vigoureuse simplicité. Le récit est vif, piquant, et d’une naïveté qui