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Les Sociétés qui proposent des sujets à traiter et qui donnent des prix, croient faire, sans doute, une chose sérieuse et bonne. Quelle que soit la force de l’habitude, quelque puissant que soit l’attrait de l’imitation, il n’est pas permis de supposer que des réunions d’hommes habitués à vivre de la vie active et féconde de la pensée, aient pu s’aveugler sur leurs propres actes, au point de continuer sans réflexion une tradition reçue, ou de la créer sans motif. Peut-être y aura-t-il quelque opportunité à étudier cette question, sans prétendre la résoudre, au moment où la Société littéraire et scientifique de Castres vient, pour la première fois, juger publiquement ce qui a été soumis à son appréciation, et distribuer des médailles, ou rendre compte des raisons qui l’ont déterminée à ne pas proclamer de vainqueur.

Il y a, Messieurs, un intérêt profond à suivre le développement de la vie intellectuelle d’un peuple, à l’étudier dans les phases par lesquelles elle passe, et dans les efforts par lesquels elle écarte les obstacles ou triomphe de leur résistance. Il y a une satisfaction autrement vive à la provoquer par l’exemple, à la soutenir par des encouragements, à la deviner dans les plus timides révélations, dans les œuvres les moins parfaites. Dans le premier cas, on assiste en spectateur ému, mais éloigné, à ce mouvement des intelligences et des cœurs, d’où sortent souvent de si grandes choses. Dans le second, on s’y mêle pour le maintenir, le diriger, le rendre fécond, frayer une voie, relever d’une défaillance, ouvrir un horizon, et par dessus tout, inspirer cette noble confiance, principe et gage du succès.

Entre ces deux rôles, le choix ne serait pas douteux. Mais si tous les cœurs peuvent s’ouvrir à toutes les ambitions généreuses, il n’est pas donné à tous d’en voir la réalisation et d’en goûter les fruits. Il n’appartient qu’à quelques-uns d’exercer autour d’eux une action souve-