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se plaint et se réjouit, accuse et défend, sans avoir lui-même éprouvé tous ces combats qu’il essaie de décrire ; mais le récit, quoique affaibli, n’en est pas moins vrai. Le ton général est terne, comme celui d’un imitateur ; mais le langage est correct, le style ne se traîne pas, et le mouvement du vers fait souvent illusion sur la faiblesse de la pensée et la constante timidité du sentiment.

Les poésies fugitives ont plus de valeur. Elles prouvent plus de flexibilité dans l’esprit, et plus de ressources dans l’imagination. Quelques-unes sont aussi des imitations : mais il semble que l’auteur en ait pris son parti, et qu’il veuille mettre un peu plus du sien dans ce qu’il emprunte aux autres. Quelques petites pièces sont pleines de fraîcheur et de grâce. Si l’on retrouve encore à chaque page, ces souvenirs mythologiques qui nous paraissent si étranges, et qui étaient alors des embellissements permis, il semble qu’il y ait des aspirations plus élevées, et un désir de liberté que l’on ne trouve pas dans les premières productions. L’hymme au soleil a plusieurs beaux vers, et l’on sent un souffle d’inspiration qui entraîne jusqu’au bout. Les souvenirs d’Ossian y sont sensibles ; et l’on ne doit pas oublier que Baour-Lormian, à cette époque, avait publié sa traduction en vers, dont le succès fut si grand. La pièce intitulée La nuit, ne manque pas de charme. Le thème n’est pas neuf, mais il y a d’heureux détails et de bons vers. Le réveil de l’enfant se fait remarquer par des traits d’une sensibilité naïve qui plait toujours, parce qu’elle est de tous les temps, et qu’elle anime ce petit tableau d’une vie réelle.

Sans doute, il y a des taches dans les meilleures pièces ; il y a surtout ce langage conventionnel, ces formes qui viennent d’elles-mêmes se placer sous la plume d’un jeune homme, comme un secours, et qui ne sont le plus souvent qu’un remplissage banal. Mais on est bientôt après dédommagé par d’heureuses inspirations, d’ingénieux aperçus, de bon vers, d’une facture libre.