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où elles ont été composées, et à l’inspiration qui les a produites. Sans douté, les grandes créations poétiques sont de tous les temps, et si des considérations particulières, peuvent leur donner ou leur ôter quelque chose de leur force ou de leur grâce, le fond est toujours le même, et les grands traité qui le reproduisent, résistent à toutes les modifications et à tous les changements. Mais des œuvres légères sont plus particulièrement empreintes d’un caractère de circonstance, qu’il ne faut pas oublier, pour ne pas être injuste, ou par indulgence ou par sévérité.

M. Albert avait vingt ans, quand il livrait au public ces premières inspirations de sa muse, comme on disait alors. On sait ce qu’est la jeunesse, sous l’empire d’un ardent enthousiasme ou de fortes émotions. Il lui semble que tout s’ouvre devant elle, et que tout est permis à son ambition. les poètes d’ailleurs, ne doutent jamais de rien. C’est un privilége qui les fait toujours jeunes, même lorsque l’âge aurait dû les rendre plus calmes et plus circonspects.

M. Albert, malgré la Révolution qui aurait pu rompre la tradition, avait les enthousiasmes et tous les principes de la poésie descriptive et légère, de la fin du XVIIIe siècle. La forme était et devait être pour lui, l’objet principal. Il ne s’agissait pas de trouver des inspirations nouvelles, d’aller demander à des sujets qui n’auraient pas été traités auparavant, des motifs négligés ou inconnus ; il fallait avant tout prendre les thèmes anciens, et les varier à l’infini. Ce n’était pas la poésie d’ensemble qui sollicitait l’imagination, c’était une poésie de détail, s’arrêtant à des pensées ingénieuses, à des sentiments délicats, reproduisant dans la forme ce qu’il y avait de meilleur chez les maîtres, et surtout, parce qu’ils étaient plus accessibles, chez ceux qui venaient après eux. C’était, en un mot, l’imitation dans ce qu’elle a de moins large, l’imitation du sujet, de la pensée, du sentiment, de l’image, du style. Et comme l’imitation n’osait pas aborder les grands sujets, comme elle