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leur foi dans les destinées postérieures à cette vie, et par la réalité de cet avenir.

Il résulte de cette aspiration de notre nature, un grand fait qui domine la société. C’est que la vérité ne peut pas se cacher, qu’elle ne doit pas être le privilége de quelques-uns.

On comprend que les prêtres supérieurs de l’Égypte, que les initiés aux mystères d’Éleusis, les philosophes de la Grèce et de Rome, pussent se prévaloir d’une croyance plus pure et plus parfaite que celle du peuple. Ils avaient recueilli des traditions anciennes, négligées par l’indifférence, ou dénaturées par la corruption, et ils les gardaient avec un soin jaloux, parce qu’ils avaient à craindre de voir leurs effets méconnus, ou leurs tentatives de propagation attaquées et punies. Ce qu’ils ne pouvaient pas essayer au point de vue religieux, ils n’espéraient pas l’obtenir pour les œuvres littéraires. Aussi se contentaient-ils d’un auditoire borné à quelques amis, et le poète ne craignait pas de le dire :

Odi profanum vulgus et arceo.

Chez les peuples modernes, au contraire, quelle que soit la splendeur de l’enseignement, la sublimité de la création, la hauteur des aspirations, la foule, qui ne pourra pas saisir sans doute tous les détails, s’appropriera avidemment l’ensemble. Elle trouve dans les dogmes religieux, un motif constant d’élévation pour son esprit, dans la morale, un moyen de purifier son cœur, et de le rendre accessible aux sentiments les plus généreux et les plus actifs. Or, l’on sait combien le milieu dans lequel se trouve et vit le génie, influe sur ses élans et détermine ses œuvres. Si une âme échauffée par ces rayons ardents sous lesquels germe, se développe et grandit cette force à laquelle rien ne résiste, est sûre de trouver accueil et sympathie autour d’elle, combien ne sentira-t-elle pas sa confiance et son courage augmentés ?