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Elle se développera, si la langue qui sert d’interprète au génie est accessible à une portion considérable de la nation ; et si, par sa nature même, elle ne porte pas un caractère exclusif. Des œuvres qui ne s’adresseraient pas à une nation tout entière, peuvent avoir leurs beautés ; elles n’auraient point de caractère social : elles ne contribueraient pas d’une manière efficace à ce mouvement des esprits qui est la vie réelle et, après les siècles, le souvenir vivant d’un peuple.

Une littérature grandira lorsqu’elle s’inspirera dans les croyances générales, dans les idées les plus communes. Dès lors, il y aura expansion entre les âmes : et de même que l’éloquence n’a de puissance, que lorsqu’il s’est établi comme un courant actif entre l’orateur et l’auditeur, de même, il ne pourra y avoir, pour un peuple, de véritable littérature, que lorsque les écrivains seront devenus les interprètes heureux et habiles des aspirations générales.

Une littérature se constituera, lorsqu’elle rattachera entre elles, par une idée générale ses diverses œuvres. L’isolement ne vaut rien pour l’homme : or l’isolement est inévitable pour les productions littéraires, lorsque dans la société, l’organisation n’est pas assez forte, pour constituer un tout, dont les parties soient étroitement liées entre elles. Tous les peuples surtout, sont-ils parvenus à cette unité ? Tous les peuples surtout, ont-ils su la rendre féconde, en évitant ce qu’elle a de tyrannique, et en s’emparant des avantages qu’elle offre et des garanties qu’elle donne ?

Enfin, une littérature aura une vie complète, elle existera dans la plénitude de son action et de son influence bienfaisante, lorsque toutes ses œuvres tendront à un même but de progrès individuel et d’amélioration générale. L’homme a pour mission de se perfectionner. La vie n’est pour lui qu’une épreuve plus ou moins longue, plus ou moins dure, mais toujours réelle, pendant laquelle il ne