Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 150 —

C’est un fait, et tous les raisonnements n’en infirmeront pas la portée. Le temps a tout détruit, dira-t-on. Cela est vrai, nous savons combien sont terribles les ravages qu’il fait, lorsque surtout, il est aidé dans son œuvre de destruction, par les passions de l’homme. Mais, s’il y avait eu, à côté de ces monuments dont les ruines nous frappent encore aujourd’hui d’étonnement et nous pénètrent d’admiration, des créations de l’esprit formant un ensemble harmonieux, et entourées de l’estime de la nation, n’en serait-il pas resté quelque chose ? Le souvenir n’en aurait-il pas été conservé par ces historiens patients qui parcouraient la terre pour recueillir des documents de toute nature, et s’emparer, afin de les admirer ou de les reproduire, des monuments du génie ?

Les deux royaumes d’Assyrie étaient parvenus à une civilisation, assez avancée, si nous, en croyons les historiens grecs ; ils étaient puissants, la Bible nous l’atteste. Ils cultivaient les arts ; les ruines de Babylone et les pierres arrachées à ce qui fut Ninive, le publient hautement. Et cependant rien ne vient nous révéler après des siècles, cette force qui remue, non des pierres mais des idées, que les hasards de la guerre n’atteignent pas, et qui, lors même que le peuple est vaincu et soumis, lui reste comme une consolation de son abaissement, ou lui survit, s’il disparaît, comme un éclatant témoignage de ce qu’il fut.

L’Égypte qui réunit dans son sein, tout les traits épars de la civilisation antique, et sut les ramener à une puissante unité, avait des sages dont la science touchait à tout ; elle avait un corps de prêtres dépositaire de ses croyances et gardien de ses institutions ; mais elle cachait avec un soin jaloux leurs inspirations, elle les traduisait dans une langue dont un petit nombre d’hommes avait le secret. La science était le domaine exclusif d’une portion de la société, et les créations du génie, même dans ce qu’elles avaient de plus général, comme les mystères de la religion, dans ce qu’ils avaient de plus haut et de plus satis-