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n’est, après tout, que la modération dans les plaisirs et une mesure dans les vices ?


M. Nayral lit la troisième partie de ses études sur les œuvres mêlées de prose et de vers.

Les époques parcourues jusqu’à ce moment sont les plus riches en productions de ce genre. On le comprend facilement, si l’on considère les conditions sociales au milieu desquelles étaient jetées ces compositions légères, richesse superflue, à côté d’une opulence réelle. Quelque grande que soit l’indépendance du génie, quelque liberté que réclame le caprice de l’esprit, il n’est pas possible de se soustraire à l’influence exercée par la société. Il faut toujours tenir compte des désirs, des tendances, des aspirations qui sont la manifestation ordinaire et la plus vraie de la vie intime d’un peuple. Or, au xviiie siècle, comme dans l’époque qui l’avait précédé, la vie publique était moins extérieure, les événements littéraires étaient plus nombreux et plus importants. On se passionnait pour un homme ou pour une œuvre. Les antipathies littéraires avaient l’ardeur et l’entraînement que nous avons vu plus tard excités par des divisions politiques. Seulement, les conséquences étaient moins graves, et la lutte moins sanglante. La cour et la ville pouvaient être divisées en deux camps par les sonnets de Job et d’Uranie, sans que la tranquillité publique fut troublée, et sans que l’on fut réduit à se mettre en peine sur l’existence du lendemain.

Les moindres productions avaient alors de l’importance. L’auteur se faisait de son œuvre une idée exagérée, sans doute, mais qui répondait de sa bonne foi et de son travail : le lecteur, dont l’attention était moins partagée, s’arrêtait sur tout ce qui s’offrait à sa curiosité, sans paraître soupçonner qu’il fut possible de dédaigner ce que l’esprit avait conçu. Ces dispositions étaient favorables, il est facile de s’en rendre compte. On faisait, sans doute, un événement des plus futiles productions ; mais on accueillait