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complet qu’il puisse recevoir. Mais l’imitation est rarement heureuse : il faut qu’elle soit conduite par un vrai talent, et inspirée par le goût le plus épuré, pour avoir droit à quelque attention. Si les imitateurs du poète qui a chanté dans de si beaux vers la Mémoire du Grand Henri, n’ont pas hérité de ce qui faisait le succès de leur maître, ils ont servi du moins à faire comprendre sa valeur. Ils ont continué son influence sur une langue qui allait passer par de rudes épreuves. Ils lui ont conservé un peu de ce prestige littéraire qui reste, alors même que de puissantes circonstances restreignent son action extérieure et son usage populaire.

Cependant, il y avait dans les conseils de la royauté, un dessein longtemps mûri, formellement arrêté, de ramener à l’unité tous les éléments qui formaient la vie politique, intellectuelle et sociale de la nation. Il est facile de suivre, aussi bien dans les grandes mesures, que dans les plus petits faits, les traces de cette pensée qui se montre si persévérante dans la conduite de la race Capétienne.

François Ier avait proscrit le latin, parce que sa domination exclusive dans les actes publics était un obstacle au développement et à l’extension de la langue nationale. On ne trouve pas chez ses successeurs, de mesure dirigée spécialement contre l’emploi de la langue méridionale ; mais il n’est pas possible de méconnaître que tout se réunit pour lui substituer le Français. On n’enlève pourtant pas facilement à un peuple qui a déjà une longue existence, l’expression vivante et usuelle de sa pensée. En 1683, quarante ans après l’avènement de Louis XIV, dix ans après la mort de Molière, dans les derniers jours de Corneille, après les plus éclatants succès de Racine, au milieu même des triomphes oratoires de Bossuet et de Bourdaloue, le Midi qui n’était pourtant étranger, par une partie de sa population, à aucun des chefs-d’œuvre de notre langue, s’obstinait dans son attachement à l’idiôme de ses pères. Cette même année, la ville de Castres