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les entretiens du jeudi chez Conrart en une réunion publique protégée et dotée par le roi, des tentatives nombreuses avaient eu lieu. La première est celle de Baïf. En 1570, Charles IX se proclame dans des lettres patentes, son protecteur et son premier auditeur. Les troubles civils, les guerres religieuses, les oppositions de système littéraire dispersent les membres. En 1612, le projet est repris. Saint-François de Sales et la Savoie nous donnent l’exemple. La langue un peu ébranlée par la réforme de Ronsard, relevée, mais appauvrie par l’influence trop absolue de Malherbe, est l’objet principal des préoccupations. On la travaille, on l’épure, on cherche à l’enrichir avec mesure, à la plier docilement selon les caprices de la pensée ou du sentiment. On fait de l’art pour soi, par amour du beau ; pour les autres, par le désir de contribuer au développement du goût public ; et ce qu’un grand corps, ce qu’une institution publique ne put pas faire, des amis des lettres le réalisèrent. Aussi doit-on au moins un souvenir reconnaissant, sinon un hommage, à l’hôtel de Rambouillet, aux salons de Scarron, de Ménage, de Mlle de Scudéry, de Mlle de Gournay, de Conrart. C’est de là que sortit l’académie française : c’est parmi leurs habitués qu’elle trouva ses premiers membres. Elle concentra, leurs efforts, dirigea leurs travaux ; et par l’heureuse et souple combinaison de sa constitution intérieure, elle les plia si bien aux exigences du milieu social qui les renfermait, qu’ils furent, dès ce moment, ce qu’ils n’ont pas cessé d’être dans les transformations de toute sorte dont notre histoire conserve le souvenir : les représentants les plus élevés, les plus éclatants et les plus vrais de notre génie national.