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mes religieux, le panthéisme le plus absolu et le plus nettement formulé ? Quand on fait une première concession et qu’on s’est éloigné de ce terrain où se rencontrent la bonne foi et la vérité, il n’y a pas de raison pour qu’on ne descende pas aux erreurs les plus grossières et les plus condamnables.

L’Apologie de Spinoza n’est pas une exposition complète des principes du juif hollandais. Il n’y est nullement question ni du Traité théologico-politique, ni de la Réforme de l’entendement, ni des lettres qui, écrites à différentes époques, pour expliquer les doctrines exposées à des attaques de toute sorte, les aggravent et les présentent sous un aspect plus simple, plus dégagé et par conséquent à la fois plus franc et plus complet.

L’abbé Sabatier n’examine que les deux premières parties de l’Éthique, qui traitent de Dieu et de l’âme. Encore même se borne-t-il à l’exposition plutôt qu’à une discussion étendue des principes de Spinoza, relatifs à la nature de Dieu, à sa corporéité et à la création du monde. Pour lui, non seulement il n’y a pas d’erreur dans cette manière alors toute nouvelle, et devenue trop commune depuis, de considérer Dieu, mais il y trouve encore l’accord le plus complet et le plus désirable entre la philosophie et la religion. Aussi déclare-t-il que, loin de favoriser l’impiété, il la combat sur son terrain.

Ce système n’est pas nouveau : on sait combien en ont usé tous les novateurs. Ou de bonne foi, ou par calcul, ils ont prétendu, lorsque leur secte n’était pas encore formée, et que l’opinion publique était puissante contre eux, qu’ils désiraient avant tout ne rien détruire de ce qui existait, ne rien combattre de ce qui était entouré de vénération. Quelques esprits faciles se laissent prendre à ces protestations. Il est pourtant impossible de les admettre, lorsque la contradiction est si évidente, l’opposition si marquée, la négation si absolue, la séparation si complète, qu’il faut vouloir fermer les yeux pour ne pas reconnaître la vérité.