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Audience du 8 août.


Des dispositions nouvelles ont été prises dans l’audience d’aujourd’hui, relativement aux accusés. Ainsi, nous remarquons qu’au lieu d’être assis à côté les uns des autres, chacun d’eux est séparé par un garde de Paris.

Leur attitude n’a pas changé. Ferré, à la dernière audience, fort arrogant, est toujours le même. Il cause souvent avec Assi qui parait non moins tranquille.

L’audience est ouverte à midi.

Ferré, se levant : J’ai des conclusions à déposer.

(L’accusé commence alors la lecture d’une pièce dans laquelle il fait des considérations toutes à l’avantage de la Commune.)

Ce ne sont pas, à proprement parler, des conclusions. Ferré ne conclut à rien : il fait d’abord l’apologie de la Commune ; il se plaint ensuite des mauvais traitements et vexations dont il prétend avoir été personnellement l’objet, et il termine en déclarant qu’il ne répondra pas aux questions qui lui seront adressées. C’est le système qu’il a employé dès le début.

M. Le Commissaire du Gouvernement : Il n’est pas admissible que l’apologie de la Commune soit faite par un accusé.

M. Le Président : Posez vos conclusions. Il peut être question de la politique de la Commune, mais non de justifier ses crimes.

M. le Commissaire du gouvernement : Que l’accusé pose ses conclusions, le Conseil appréciera.

L’Accusé : Je n’ai plus que deux mots à dire, qui ne concernent pas la Commune ; après cela, je débarrasserai le Conseil de ma personnalité.

L’accusé Ferré renouvelle ses considérations précédentes et termine en déclarant qu’il ne répondra pas aux questions autres que celles qui sont relatives à son état civil. (Mouvement.) Il dépose ses conclusions sur le bureau du Conseil.

M. le Commissaire du gouvernement : Les conclusions de l’incendiaire Ferré sont sans portée ; le Conseil n’a pas à y statuer. Aux termes de l’art. 207 du Code de justice militaire, j’ai dû imposer un défenseur à l’accusé. Aux termes de l’art. 117 du même Code, l’accusé peut, s’il le désire, se défendre aussi lui-même ; il y a déjà eu trop d’incidents dans cette affaire, on a été jusqu’à vous demander de décider si Paris est ou n’est pas en état de siège, ce qui est parfaitement indifférent.

Me Dupont de Bussac : Que signifient ces mots : « conclusions sans portée. » Nous avons le droit de prendre telles conclusions que nous jugeons convenables, et personne ne peut nous retirer ce droit.

M. le Commissaire du gouvernement : L’intérêt même de l’accusé exige que la justice ait ici un cours rapide.