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Le chef du complot devait faire arrêter les membres de la Commune et ceux du Comité central, les envoyer à Mazas et renvoyer les otages.

Le plan a échoué, d’après M. Lullier, parce que le prétexte attendu pour agir ne s’est pas présenté ; d’après M. Camus, parce que ce dernier a été arrêté par les insurgés. Il s’ensuit que les conventions n’ont plus de raison d’être.

À cette relation des actes de M. Lullier sous le Comité central de la Commune, nous n’ajouterons que peu de commentaires : l’accusé fait partie de cette catégorie d’hommes politiques qui se sont fait une religion des principes révolutionnaires ; ses relations intimes avec Flourens et Rochefort le prouvent par les doctrines exaltées qu’elles prennent pour base. C’est un homme violent de son parti, et quoiqu’il prétende avoir évité l’effusion du sang, son caractère bien connu par ses emportements, ainsi que les dispositions menaçantes prises par ses ordres les 18, 19, 20 et 21 mars, prouvent qu’il n’aurait pas hésité à combattre, comme il l’a dit lui-même dans le jardin du Luxembourg.

Si, vers la fin de la Commune, il a essayé de servir l’autorité légitime, sa rancune contre les hommes qui n’avaient pas voulu de sa dictature et des motifs de sûreté personnelle l’ont seuls animé. Enfin, son exaltation révolutionnaire, son intelligence des moyens à employer dans une insurrection et l’importante position qu’il a occupée dans celle du 18 mars, le rangent naturellement parmi les grands coupables qui ont préparé et conduit l’exécrable attentat qui vient d’ensanglanter la France.

En présence de ces faits, notre avis est que M. Lullier, ancien officier de marine, soit traduit devant le Conseil de guerre pour avoir : 1° participé à un attentat ayant pour but de changer la forme du gouvernement et d’exciter les citoyens à s’armer contre l’autorité de la République ; 2° participé à un attentat dont le but était d’exciter les citoyens à s’armer les uns contre les autres et de porter la dévastation, le massacre et le pillage dans la ville de Paris ; 3° levé ou fait lever des troupes armées, engagé et enrôlé des soldats, leur avoir fourni et procuré des munitions et des armes sans autorisation du pouvoir légitime ; 4° pris le commandement d’une troupe armée sans droit légitime ; 5° dans le but d’envahir les domaines, propriétés, villes, postes, magasins, arsenaux, bâtiments appartenant à l’État, et dans le but de faire attaque et résistance envers la force publique agissant contre les auteurs de ces crimes, avoir pris le commandement de bandes armées ; 6° provoqué des militaires à passer aux rebelles armés, et leur en avoir sciemment facilité les moyens, crimes prévus par les art. 87, 91, 92, 93, 96 du Code pénal ordinaire, et l’art. 208 du Code de justice militaire.