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Préfecture : de police, vit, vers dix heures du matin, Ferré et cinq autres individus en civil ayant un fusil en bandoulière entrer à la préfecture et gagner l’escalier de service. Ferré lui dit : « Dépêchez-vous de vous en aller, nous montons mettre le feu. Dans un quart d’heure, ce sera en flammes. » Une demi-heure après, le témoin vit sortir les flammes des deux fenêtres du parquet du procureur général où Raoul Rigault s’était installé pendant l’insurrection. Le témoin remarqua que Ferré avait un collet de velours noir.

La femme Campagne vit le même jour quelques individus badigeonner les murs de la Préfecture de police avec du pétrole ; elle remarqua parmi eux, au moment où ils sortaient, un homme plus que petit que les autres, portant un pantalon à bandes noires.

Le témoin Rigeand, comme nous l’avons cité plus haut, dépose dans le même sens.

On ne doit pas s’étonner que le délégué à la Préfecture de police ne voulût pas laisser intact le siège de son administration sanglante et les archives, accusations qui contenaient les dossiers de ses compagnons de crime. L’accusé a donné l’ordre signé par lui d’incendier le ministère des Finances, en ces termes : « Citoyen Luçay, faites flamber Finances et venez nous retrouver. » L’écriture a été contrefaite à dessein ; nous avons fait étudier et comparer la note en question par un expert appelé dans ce but, qui a reconnu l’écriture conforme à celle de nombreuses lettres écrites par Ferré.

Le 24 mai, jour des assassinats et incendies déjà cités, le témoin Vathier, détenu à la Roquette pour vol, dépose que Ferré en bourgeois, avec une écharpe rouge, se présenta à la Roquette avec une centaine de gardes du 195e et du 206e. Il dit à ces hommes : « Citoyens, vous savez combien il en manque des nôtres. On nous en a pris six, nous en avons six à fusiller. » Le témoin vit peu après les six otages : l’archevêque de Paris, Mgr Darboy, M. le président Bonjean, l’abbé Allard, les pères Ducoudray et Clere, l’abbé Deguerry.

Le 26 mai, le nommé François, directeur de la Roquette sous la Commune, reçut un ordre signé de Raoul Rigault et de Ferré, portant de remettre le nommé Jecker au juge d’instruction.

Le 27, le témoin Pinet, sous-brigadier de la Préfecture de police, vit Ferré à la Roquette, devant la porte du greffe, qui ouvrait en donnant des ordres parmi des gens de mauvaise mine.

À la même date, le délégué à la police fit délivrer les malfaiteurs détenus dans la prison en leur donnant des armes ; ces derniers s’associèrent alors un grand nombre de prisonniers, parmi lesquels se trouvaient soixante-six gendarmes. Cependant, les prisonniers qui vivaient encore résolurent de se défendre ; les meurtriers reculèrent, mais il tendirent un piège en promettant la liberté et en criant : « Vive la ligne ! » Les abbés Surat, Bécaut et Houillon et le sieur Chaulieu furent victimes de cette trahison. Ferré est complice de ces as-