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« D’ailleurs, l’emplacement pour lequel il a été visiblement exécuté, en ce sens qu’il épouse la forme architecturale du panneau et fait pendant à une autre toile de même forme, signée Desgoffe, ne présente aucune atteinte d’humidité pouvant nuire à la conservation du tableau.

« La seule objection vraiment sérieuse à présenter est le manque presque absolu de lumière.

« M. le Curé, en présence de l’intérêt tout spécial manifesté par la Commission du Vieux Paris pour une œuvre qu’il est heureux de posséder dans son église et dont il n’ignorait pas la valeur, s’est spontanément offert soit à faire remplacer un vitrail peint en grisaille par une verrière blanche, soit à déplacer le tableau et à l’installer, d’accord avec la Commission administrative des Beaux-arts, à la place qui serait jugée la meilleure.

« Il offre même de faire, au besoin, exécuter les travaux nécessaires pour l’installation en pleine lumière du tableau dont il s’agit au-dessus de la place qu’aurait dû occuper un maître-autel.

« MM. J.-P. Laurens et Baudouin, à l’issue de cette séance, ont été d’avis que, dans ces conditions, il serait peut-être fâcheux d’enlever le Baptême du Christ de Corot de l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, pour laquelle il a été sûrement conçu, et que, d’ailleurs, en thèse générale, tout tableau religieux qui ne court aucun risque de détérioration et qui peut être exposé d’une façon rationnelle est mieux à sa place dans l’édifice, quel qu’il soit, pour lequel l’artiste l’a composé.

« Au cours de sa visite dans l’église, la Commission a constaté le mauvais état d’un tableau de Restout. Bien que ce tableau n’appartienne pas à la ville de Paris, la Commission a cru devoir, sur la demande de M. le Curé, l’examiner.

« Elle a constaté que la détérioration apparente n’a été provoquée que par un défaut dans la trame de la toile, défaut qu’il sera facile de réparer en appliquant par derrière une bande de toile marouflée qui assurera la conservation d’une œuvre réellement intéressante, mais qui, appartenant à la fabrique, ne fait pas partie du domaine artistique municipal. »

M. Brown ajoute qu’à la suite de ce rapport il a chargé M. Mercier, restaurateur de tableaux, d’examiner soigneusement l’œuvre de Corot et d’en commencer la restauration. M. Mercier constata que le tableau était en bon état sauf quelques craquelures peu importantes et qu’il n’avait besoin que de légers travaux, et aussi d’être reverni au vernis mat, afin de lui donner cette couleur blanche et laiteuse qui est la dominante du talent de Corot. M. Mercier a été également chargé de la restauration du tableau de Desgoffe, qui, dans la chapelle des fonts, fait pendant au précédent, et qui est conçu dans les mêmes proportions et dans le même style sans toutefois offrir le même intérêt.

Le travail terminé par M. Mercier, M. Brown s’est rendu avec M. Lucien Lambeau, secrétaire de la Commission, à l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, afin de constater la restauration faite, ainsi que l’état du mur sur lequel il doit être appliqué à nouveau. Assistés de M. le vicaire Delaunay, peintre distingué, la constatation a pu être faite que le travail avait été consciencieusement exécuté et que le mur de la chapelle des fonts était absolument indemne et parfaitement en état de recevoir la peinture dont il s’agit.

Restait la question d’éclairage. La chapelle des fonts est, en ce moment, pourvue d’un vitrail à personnages qui intercepte la lumière. Ce vitrail sera déposé et, à sa place, sera installée une verrière blanche entourée d’un encadrement en couleur du xviie siècle, que possède l’église. D’un autre côté, la fabrique prendra à sa charge la peinture en ton clair des boiseries de la chapelle, afin de mettre plus en valeur les deux tableaux qui doivent la décorer.

M. Brown estime donc, dans ces conditions, que la Commission du Vieux Paris aura reçu pleine satisfaction, et il lui propose de décider que le tableau restera à la place pour laquelle il a été peint, dans cette église si artistique, conçue et décorée par Lebrun.

La proposition de M. Brown est adoptée.

M. Brown prie la Commission de décider, en outre, que la 3e Sous-commission se rendra à l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet dès que les travaux seront terminés, afin de juger de la nouvelle installation.

Adopté.

M. Guiffrey dit qu’il est absolument partisan de laisser dans les églises les objets d’art qu’elles peuvent contenir, mais il voudrait cependant, en ce qui concerne les tableaux, que ceux-ci pussent être appréciés du public. Il cite la célèbre Pieta, d’Eugène Delacroix, à Saint-Denis-du-Saint-Sacrement, qui ne jouit pas d’un jour parfait, et qui, par conséquent, ne peut être jugée à sa valeur.