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accidents antérieurs, le nouvel architecte fit cette voûte en remplissages très minces, 0 m. 10 c. d’épaisseur, composés de petits éclats de pierre noyés dans le plâtre, avec tracé d’appareil gravé sur la surface interne. Bien que, dans ces conditions, cette voûte n’eût pour ainsi dire pas de poussée, le nouveau chevet fut néanmoins épaulé par quatre puissants éperons un peu bien exagérés ict.

Comme toujours, l’état des choses établi provisoirement eut une longue durée : c’est, en effet, seulement vers l’année 1560 que la voûte de la grande nef fut rétablie ; les remplissages de cette voûte à nervures du xvie siècle sont faits en moellons appareillés, n’ayant que 0 m. 18 c. à 0 m. 20 c. d’épaisseur, et posés en plâtre ainsi que les arcs doubleaux, diagonaux et formerets. En même temps que Cette voûte, assez légère était faite, de nombreux tirants en fer ont été passés en travers de la nef, au-dessus de l’extrados des voûtes, pour empêcher l’écartement des murs latéraux. Les bas côtés sont restés plafonnés et le sont encore aujourd’hui.

Dans son Histoire du diocèse de Paris, publiée en 1750, l’abbé Lebeuf signale le portail occidental de l’église Saint-Pierre comme datant du xiiie siècle.

Il s’agit évidemment de la façade du pignon refaite en même temps que les premières travées de la nef et recouvertes, sous Louis XVI, par le placage actuel d’ordonnance classique.

À l’intérieur de ce pignon on voit encore les arcs formerets anciens et l’ébrasement d’une grande fenêtre ogivale occupant le milieu de la nef principale. Le mur extérieur du bas côté nord a été refait aussi sous Louis XVI, sauf la première travée, où le mur du commencement du xiie siècle a été conservé avec sa fenêtre primitive placée dans l’axe de la grande arcade de la nef.

L’abbé Lebeuf indique aussi comme étant moderne la tour placée à gauche du portail occidental. Cette tour informe, démolie tout récemment, avait été construite pour remplacer le clocher du xiie siècle situé à la gauche du chœur, que son état de ruine avait obligé à démonter vers la fin du xviie siècle.

L’ancien clocher roman est encore figuré à côté du chœur, sur le plan de Paris à vol d’oiseau dressé par Vassalieu, dit Nicolay, en 1609.

Il était nécessaire de résumer brièvement ici l’historique de la construction de l’église Saint-Pierre, afin de délimiter exactement les parties de l’édifice érigées ou rebâties à diverses époques. Cet exposé succinct facilitera, d’ailleurs, l’appréciation, en connaissance de cause, du caractère des travaux proposés aujourd’hui. Pour compléter ces notes préliminaires, je mentionnerai la construction de la tour ronde montée en 1795 sur l’abside pour l’installation du télégraphe à signaux des frères Chappe, et enfin la réfection du mur du bas côté sud vers 1845, ainsi que le rétablissement tout récent du transept sud, effectué en 1874.

On conçoit facilement qu’après avoir traversé tant de vicissitudes, l’église Saint-Pierre de Montmartre soit aujourd’hui en assez mauvaise situation. Ce qui n’a pas peu contribué aux dégradations de l’édifice, c’est le défaut prolongé de l’entretien de la nef, et particulièrement l’abandon complet dans lequel tout le chœur a été laissé depuis près d’un siècle. Aussi les travaux à faire pour restaurer cet intéressant monument auraient-ils nécessairement une assez grande importance, augmentée encore par le rétablissement de parties détruites, indispensables à l’exercice du culte. Ainsi l’église est aujourd’hui dépourvue d’emplacement pour l’installation des cloches.

En dernier lieu, celles-ci étaient suspendues sur un pilône en charpente établi auprès de l’église.

La reconstruction, très modeste, du clocher du xiie siècle à son emplacement primitif me semble donc s’imposer. D’autre part, le pignon actuel du transept nord, de construction moderne en moellons plâtrés, et informe d’ailleurs, ne peut guère être conservé à cause de son mauvais état.

La reconstruction forcée du clocher avec sa tourelle d’escalier, dont le soubassement ancien vient d’être mis à jour, implique, du reste, il me semble ; le rétablissement du transept nord sur.ses anciennes fondations retrouvées dans les fouilles récentes.

Le pignon, moderne aussi, du transept sud, mais construit en pierres de taille, est en assez bon état de solidité. Les petites lézardes qui s’y sont produites ne paraissent pas avoir de gravité et pourraient être reprises facilement.

C’est pourquoi, bien que le caractère archéologique de ce transept laisse à désirer, je crois devoir en proposer la conservation.

Pour le chœur, tous les éléments anciens existent à l’exception de la partie haute du clocher.