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notes d’un condamné politique.

c’est encore à sa sollicitude que nous dûmes d’avoir un poêle au bout de quelques jours : il en était temps, car nous souffrions horriblement du froid.

Qu’il me soit permis d’introduire ici une réflexion qui me fait du bien au cœur, à moi enfant de l’Église Catholique, réflexion sur le rôle du prêtre. Au commencement de ce terrible mois de Novembre 1838, le village de Beauharnais était au pouvoir de l’insurrection, les amis du gouvernement étaient prisonniers et tremblaient, le prêtre était là qui les protégeait, et pour eux la plus grande faveur était, bien qu’ils fussent protestants, qu’on leur permît de s’aller abriter sous le toit du presbytère… À la fin de ce même mois de Novembre, le même village est au pouvoir des troupes anglaises et les patriotes sont prisonniers à leur tour, c’est encore le même prêtre qui protège ces autres prisonniers, et adoucit les rigueurs de leur dure captivité !

Les arrestations continuaient, et on vint un jour nous dire que la prison de Montréal, regorgeant de prévenus, on allait faire notre procès à Beauharnais, où l’on se disposait à ériger l’échafaud destiné à l’exécution des plus compromis.

Le même magistrat dont j’ai déjà parlé avait, je ne sais par quelle autorité, ordonné à tous les canadiens de venir livrer les armes qu’ils avaient en leur possession : un certain nombre se rendirent à cet ordre, et ces armes étaient de suite