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NOTES D’UN CONDAMNÉ POLITIQUE.

cieuses salutations, je me hâtai de courir chez tous mes compatriotes et amis, pour leur faire part de l’heureuse nouvelle que je venais d’apprendre, d’une source aussi respectable qu’authentique.

Néanmoins, pendant longtemps encore, nous en fûmes pour les transports de joie dans lesquels cette nouvelle nous avait tous mis. Les paquets arrivaient tous les mois, les uns après les autres, et rien n’arrivait pour nous. Pourtant nous ne perdions pas toute espérance : nous savions bien que le gouverneur ne s’était pas joué de nous, et nous le supposions bien presqu’aussi désappointé que nous d’avoir été ainsi induit à faire briller à nos yeux un espoir qui ne se réalisait pas. Au reste, il y avait dans tout cela une chose qui nous paraissait très-certaine, c’était qu’une souscription suffisante avait été faite par nos compatriotes et que le montant en était déposé en Angleterre. Nous nous disions donc les uns aux autres : — Courage, tôt ou tard, il faut que ça vienne !

Un bon nombre de ceux qui restaient étaient dans un état voisin de la détresse, et ne voyaient pas jour à jamais pouvoir amasser la somme, assez considérable, qu’il fallait pour payer un passage de Sydney en Angleterre. Un seul d’entre eux était marin mais âgé, aucun patron de navire n’était pressé d’ajouter à son équipage des hommes que devait tourmenter le mal de mer à chaque tempête ; au reste il y avait assez de jeunes gens au pied marin qui cherchaient à ga-