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NOTES D’UN CONDAMNÉ POLITIQUE.

pagnons libérés d’exil s’occupaient des préparatifs de leur départ. On était au mois d’août 1844. Ils s’étaient réunis pour traiter du prix de leur passage jusqu’en Angleterre avec le capitaine d’un navire marchand en partance. C’était le meilleur moyen à prendre et ils réussirent à faire un bon marché.

Il y avait quatre jours que j’étais installé au comptoir de mon nouveau maître, lorsqu’ils vinrent me dire adieu et me souhaiter, à moi-même, un prompt départ. Je leur présentai mes vœux pour un heureux retour au pays : mon émotion trahissait la profonde douleur que je ressentais de ne pouvoir partir avec eux. Ils m’encouragèrent, en me disant que nos compatriotes ne nous abandonneraient pas, que certainement une souscription serait faite pour nous retirer de cette plage, dont le sol devenait comme brûlant sous mes pieds, depuis qu’il m’était permis de revoir notre cher Canada.

Le soir du même jour, nous nous réunîmes plusieurs pour nous consoler un peu et nous encourager mutuellement, fondant notre espoir d’un prompt départ sur mille hypothèses plus ou moins probables. Nous comptions sur la générosité de nos compatriotes, et nous ne comptions pas en vain ; mais je ne sais comment il se fit que les personnes chargées d’administrer les fonds de secours, ne purent alors trouver les moyens de nous faire tenir de suite ces deniers, plus nécessaires pour nous à Sydney qu’en Angleterre.