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XXI

COMMENT PAR ACCIDENT JE DEVINS FABRICANT DE CHANDELLES OU À PEU PRÈS.


Il y avait un an que nous étions employés à la fabrication des lattes, lorsque vint fondre sur notre établissement une calamité qui pouvait avoir des suites terribles relativement à notre situation ; car tout est relatif dans ce monde.

Le feu mis dans les bois à quelques milles de notre cabane s’avançait vers nous poussé par le vent : lorsque nous en fûmes avertis, il n’était plus qu’à deux milles de notre chantier. Aussitôt que l’alarme nous fut donnée, nous courûmes de suite à la cabane : une partie de notre troupe s’occupa à sauver de la case les hardes et autres effets, provisions et petites valeurs. Nous n’avions, mon associé et moi, en dehors des habits qui nous couvraient, et de nos lattes, dont une cargaison était prête à partir, que deux couvertures de laine. Ceux qui s’étaient chargés des effets, mon associé était du nombre, coururent avec leurs charges vers une profonde ravine bordée de rochers nus et au fond de laquelle coulait un ruisseau. Le reste de notre troupe resta pour tâcher de sauver le bois manufacturé, les planches, pièces de charpente, bardeaux et lattes.

Pour moi, je me dirigeai vers notre tas de lattes et me mis de suite à nettoyer jusqu’à la