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notes d’un condamné politique.

jour-là, pendant lequel des devoirs envers Dieu m’appelaient ailleurs qu’à son atelier. Comme il insistait, je lui dis que j’irais, ce jour même, parler à mon premier maître duquel il m’avait sous-loué, pour qu’il annulât le marché passé avec lui, et qu’au besoin, je m’adresserais aux autorités dont je relevais par ma pénible position.

J’allai effectivement, après la messe, trouver mon maître le Français de l’Île Maurice, et lui contai mon affaire. Celui-ci convint de mon droit à me refuser au travail du Dimanche ; mais il ajouta que, pour lui, il n’avait rien à me donner à faire, et que si je ne pouvais m’arranger avec mes confiseurs, il serait obligé de me remettre au gouvernement. Je pris alors la résolution d’aller moi-même le lendemain au bureau de l’administration dont je relevais, pour y prendre connaissance du rapport que mon premier maître devait y loger, et plaider de mon mieux ma cause.

Je ne dormis pas tout-à-fait tranquille cette nuit-là, tant j’appréhendais d’avoir affaire aux gens du gouvernement ; aussi ne fut-ce pas sans crainte que le lundi matin je franchis le seuil du bureau en question, immédiatement après son ouverture. Je demandai à voir le chef du département en personne, et on m’introduisit auprès de lui. Je vous avoue que j’avais peu de confiance dans cette démarche, dont je redoutais même les résultats ; mais il s’agissait d’une question que je voulais de suite mener à solution.