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NOTES D’UN CONDAMNÉ POLITIQUE.

ver dans ces climats : à cette époque de l’année les jours restent encore chauds, quand il ne fait pas d’orage, mais les nuits sont froides et humides. Ce fut une de ces nuits froides que nous eûmes, pour la première, à passer couchés, sans couverture aucune, sur les planchers mal joints de nos cases : aussi, quand on vint le matin vers six heures ouvrir les portes, fermées à la clef, de nos logements, nous trouva-t-on tous échinés et munis d’un gros rhume ; quelques-uns même se sentaient sérieusement malades.

La journée du 12 fut froide et pluvieuse, nous la passâmes dans l’inaction ; mais on nous informa que nous serions le lendemain conduits à l’ouvrage.

Notre régime alimentaire était détestable. Notre déjeuner se composait d’un brouet de farine de maïs, auquel on ajoutait de la cassonnade de qualité inférieure : notre dîner, dont la matière devait aussi servir pour le souper, consistait en une demi-livre de bœuf, apporté de Sydney dans la pire des conditions, et en une douzaine d’onces d’un pain mal fait avec de la mauvaise farine. L’eau courante ou de puits manquant dans le voisinage immédiat de nos logements, nous étions obligés de nous servir d’eau de pluie, recueillie dans des citernes creusées en terre.

Le soir, avant de nous mettre de nouveau à la clef dans nos abris, on nous fit mettre en rang pour nous compter. Il nous fallut encore coucher sur le bois sans couverture, et ce traite-