Page:Premier recueil de diverses poésies tant du feu sieur de Sponde que des sieurs Du Perron, de Bertaud, de Porchères et autres, non encor imprimées, recueillies par Raphaël Du Petit Val, 1604.djvu/39

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Et si nos passions estoyent d'humeurs esgales,
Mes feux desjà seroyent esteints sous vos glaçons.

Mais quoi ! si je ne meurs moymesme il faut qu'ils vivent
Et que leur sort se trouve avec le mien conjoint,
Que si vos cruautez encores vous poursuyvent
Ils ne peuvent mourir, & moi ne mourir point.

C'est ce que vous cerchez : car m'ostant la creance
Que toute Amante doit par droit à son Amant,
Vous estes proprement à mon feu son essence,
Car le feu ne vit point s'il n'a son aliment.

Helas ! ne m'ostez point si promptement la vie
Si les Cieux ont encor mon destin retardé,
Vous seule de moy seul pouvez estre servie
Comme un Soleil de l'Aigle estre bien regardé.


Sur la fievre


Que faites vous dedans mes os
Petites vapeurs enflammees,
Dont les petillantes fumees
M'estouffent sans fin le repos ?

Vous me portez de veine en veine
Les cuisans tisons de vos feux,
Et parmi vos destours confus
Je perds le cours de mon haleine.

Mes yeux crevez de vos ennuis
Sont bandez de tant de nuages,
Qu'en ne voyant que des ombrages
Ils voyent des profondes nuits.

Mon cerveau siege de mon ame
Heureux pourpris de ma raison,
N'est plus que l'horrible prison
De votre plus horrible flamme.