Page:Premier recueil de diverses poésies tant du feu sieur de Sponde que des sieurs Du Perron, de Bertaud, de Porchères et autres, non encor imprimées, recueillies par Raphaël Du Petit Val, 1604.djvu/38

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Qui m'enchaines les jours comme insensiblement
Trouvez moy quelque fin à mon esloignement
Mais ne me trouvez point de fin à ma constance.


STANCES


N'est ce donc pas assez que je sois tout en flamme
Tout en flamme de vous, & pour vous mon flambeau,
Si pour mieux me fermer la porte de votre ame
Vous ne m'ouvriez encore celle de mon tombeau.

Vous n'estes point contente, & j'en ressens les preuves,
Pour tant d'entiers tesmoins de ma fidelité,
Et les rompez plustost comme de petits fleuves,
A vos rocs endurcis de l'incredulité.

Mais que vous restoit-il, si vous pour tant de geines
Que vous m'avez donné, ne m'avez point perdu?
Si mesme pour le mal de vos injustes haines
Mon innocent Amour du bien vous a rendu ?

Quand vous dardiez sur moi vos flammesches bruslantes,
Je presentois sur moi mon ame à leurs ardeurs,
Et tant plus je sentois ces ardeurs violentes,
Tant plus je leur rendois de plus douces odeurs.

J'ay languy tout un temps en ce long sacrifice,
Paisible à vos rigueurs, sur votre saint Autel,
Et s'il fust onc Martyr de l'amoureux supplice,
Ou jamais il n'en fust, ou n'en fust jamais tel.

Ores que j'attendois que vostre ame apaisee
Print enfin le chemin d'une aimable douceur,
La voila de nouveau remise en sa brisee,
Et moi plus esgaré du chemin le plus seur.

Vous m'eschappez encor dans ces tortus Dedales
De deffis ombrageux et d'inconstants soupçons,