Page:Premare - Lettre inédite du P. Premare sur le monotheisme des Chinois, edition Pauthier, 1861.djvu/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mène et qui gouverne, c’est être bien loin de la vérité. Kien youen est invisible et ineffable, mais il n’y a rien qu’on voie mieux et dont on puisse tant parler que du Ciel. C’est pourquoi l’Y-king prend si souvent le Ciel pour un de ses principaux symboles ; mais l’Être désigné par Kien ne se borne pas au Ciel, qui n’est qu’une faible image de quelques-unes de ses perfections. »

5° Le Chou-king, chapitre Tai-kia, dit ;

« Le Ciel n’a point d’amour particulier pour personne ; i[1] n’aime que ceux qui veillent sans cesse sur eux-mêmes 1. »

« Le Ciel est très-élevé au-dessus de nous, dit Youen leâo fan ; il a de la majesté, mais il n’a point d’affection parliculière pour personne. Quand vous veillez avec attention sur vous-mêmes, votre cœur est uni avec le suprême Seigneur, Chang-ti, et c’est alors que le Seigneur vous aime ; mais du moment que vous vous oubliez, le Seigneur ne vous aime » plus[2]. »

Au chapitre Yen-yeou-y-te, le texte dit :

« Il est difficile de compter sur la protection continuelle du Ciel. — Si vous faites bien votre devoir, dit le Ge-ki, il vous récompense ; si, demain, vous vous relâchez, il vous châtie. »

Tckou-hi, sur l’ode 敬之 King-tchi (du Livre des Vers), s’exprime ainsi :

« La raison du Ciel est très-intelligente ; il n’est pas aisé de conserver ses dons. Ne dites pas : Il est bien loin de nous ; il ne nous voit pas ; sachez qu’il est clairvoyant, qu’il descend et qu’il entre dans tout ce que vous faites, qu’il est présent à tout, et qu’il voit tout ce qui se passe ici-bas. C’est

  1. 惟天無親。克敬惟親 Wèi thiân woû thsin khe king wêi thsin.
    Solùm cœlum sine propinquo-amore ; (qui) possunt sibi-invigilare soli propinqui (ei sunt).
  2. Cet écrivain distingué a été mentionné précédemment. C’est dans son explication du passage du Chou-king, reproduit ci-dessus, qu’il s’exprime ainsi. (G. P)