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sais combien de doctrines ; c’est lui donner je ne sais combien de charges et de devoirs à remplir[1]. »

Et dans un autre endroit : « Le Ciel vous a fait naître et il a gravé dans votre cœur les principes de la sagesse ; mais les suivre ou ne les suivre pas, cela dépend de vous. Vous pouvez faire le bien ; vous pouvez aussi faire le mal. C’est pourquoi le Ciel a mis sur le trône un roi et tout ensemble un maître, afin de vous rendre parfait. Après vous avoir donné la nourriture du corps, il vous instruit de vos devoirs, afin que tout le monde les remplisse[2]. »

On m’objectera qu’on fait à Tchou-hi cette difficulté : « Il s’ensuit que quand le Ciel et la Terre produisent un Saint ou un Sage, c’est par pur hasard et sans aucun dessein de leur part. » Tchou-hi répond : « Quand est-ce que le Ciel et la terre ont dit : Allons ! je veux faire éclore un Saint ou un Sage ! C’est la matière qui, en certaine quantité, s’unit et s’assemble en certain lieu, d’une certaine manière ; et de là naît un Saint ou un Sage ! Quand il est né, c’est comme si le Ciel avait eu le dessein formel de le faire naître[3]. »

Je réponds, moi, que, si on ne peut accorder ces paroles de Tchou-hi avec ce qu’il a dit sur le songe de Kao-tsong, et avec ce que j’ai rapporté de lui dans la page précédente, il faut convenir que Tchou-hi se contredit pitoyablement. Or, les Chinois n’en conviendront pas ; mais ils conviendront encore moins que Tchou-hi prétende anéantir la doctrine du Chou-king, dont le principal article, comme dit le Ge-ki (l’explication journalière), consiste dans le dessein que le Ciel a en les rois[4]. En effet, au chapitre Taï-chi, le texte dit : « Le ciel assiste les peuples ; il leur donne un roi, il leur donne un docteur[5]. »

  1. Ibid., p. 58.
  2. Sur ces mots du Chou-king 天佑下民 thièn yéou hia min « le Ciel, pour aider le peuple inférieur,) » etc., dans le Chou-king ta thsiouen, k. vi, p. 3. (Pr.)
  3. C’est au chap. xxxi du Sing-li-huei-toung, p. 19.
  4. Kiouen vii, page 5.
  5. 天佑下民。作之君 Thién yéou hià min. tso tchi kiun,
    Coelum adjuvandum humilem populum : fecit et principes