Page:Premare - Lettre inédite du P. Premare sur le monotheisme des Chinois, edition Pauthier, 1861.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il s’imagine que ce Li est réellement dans la matière Khi, au lieu qu’il n’est proprement que dans nous. Je crois cependant que Tchou-hi n’a pas même ignoré cela, car voici comment il parle de l’âme de l’homme, que le texte appelle 明德 ming-te (vertu ou puissance claire) :

« C’est, dit-il, cette puissance que l’homme reçoit du Ciel ; elle est dégagée de la matière, elle est intelligente, elle n’est pas de soi ténébreuse ; c’est pourquoi elle reçoit toutes les raisons et répond à toutes sortes d’affaires[1]. »

Tsaï Hiu-tchaï explique très bien cet endroit de Tchou-hi.

« Le cœur, dit-il, est quelque chose de vivant ; mais il ne vit qu’en tant qu’il est spirituel, intelligent, connaissant et sensible : c’est pour cela qu’on l’appelle l’esprit de l’homme. Ce muscle qui est dans notre poitrine, n’est tout au plus que le rendez-vous et le siège de l’esprit ; mais ce n’est point l’esprit. Pour être esprit, il faut pouvoir contenir toutes les raisons et répondre à toutes sortes d’affaires. Or cela est fort au-dessus de ce morceau de chair qu’on appelle aussi le cœur[2]. »


  1. 明徳者。人之所得乎天 Ming te tchè jin tchi ssô te hoû thiên.
    « Clara virtus » quæ : homo ea id-quod obtinet a Cœlo,
    而虚靈不昧。以具眾 eûlh hiû ling pou mêi, i kiu tchoung
    et vacua intelligentia non obscura, ad providendum omnibus
    理。而應萬事者也。 Li ; eûlh ying wên ssé tché yé.
    Ratio, et respondet omnibus actionibus quæ (aguntur.).

    C’est le Tchang-kieou, ou Commentaire de Tchou-hi sur le Ta-hio, f° I. — Nous avons ainsi traduit ce passage, dans notre Édition chinoise — latine et française de ce premier des Quatre Livres classiques. « L’expression ming-te « Clara virtus » désigne ce que les hommes reçoivent du ciel, et qui, étant immatériel, intelligent et non dénué de raison, constitue le principe rationnel de tous les hommes et fait sentir son influence sur toutes les actions de la vie. » (Ta-hio, en chinois, en latin et en français, avec la traduction du Commentaire de Tchou-hi, p. 18-19.) (G. P.)
  2. Tsaï-tsing, surnommé Hiu-tchai, vivait sous la dynastie précédente (des