Page:Premare - Lettre inédite du P. Premare sur le monotheisme des Chinois, edition Pauthier, 1861.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’est que la durée d’un jour, et que, comme il a commencé, il doit finir ; sitôt qu’il ne pourra plus croître, il commencera à s’approcher à tout moment de sa ruine ; mais ne sera pas plutôt totalement détruit, qu’il renaîtra de ses cendres, comme le jour sort de la nuit et le mouvement du repos

Si on leur nie cette succession imaginaire, ils ne sauraient la prouver ; c’est un article qu’il faut leur accorder, comme à Épicure, la déclinaison de ses atomes. Enfin, pour dire un mot de leur 五行 ou hing, cinq éléments, ces éléments viennent à chaque pas. Plusieurs Européens s’en réjouissent, mais les quatre éléments d’Aristote étaient-ils de meilleur aloi ? Et d’où savent-ils que les Chinois prétendent que chaque être corporel est composé de ces cinq espèces d’êtres ? Pour moi, je dirai plutôt que c’est comme un cadre dans lequel ils font entrer mille choses le mieux qu’ils peuvent. Par exemple, les yeux se rapportent au feu, la bouche à l’eau, l’oreille droite au bois, la gauche au métal et le nez à la terre. L’orient appartient au bois, l’occident au métal, le midi au feu, le septentrion à l’eau, et la terre est réservée pour le milieu, etc.

C’est de ce système philosophique des Chinois modernes que deux ou trois missionnaires ont conclu que les Chinois lettrés ne valent pas mieux que l’impie Spinosa. S’étant une fois fortement persuadés qu’ils avaient raison, on ne doit point s’étonner qu’ils aient proscrit tous les termes dont on se sert en Chine pour signifier le vrai Dieu. Voici comment ils ont raisonné ;

« Tchou-hi et ses disciples disent de 太極 Thaï-khi tout ce que les anciens King ont dit de Thien, de 上帝 Chang-ti, etc. Mais il est clair que Thaï-khi n’est autre chose que le Li athéistique des Chinois ; donc Thien, Chang-ti, etc., ne sont pareillement que le Li athéistique des Chinois. »

Supposé qu’il fût vrai que les Soung-jou, c’est-à-dire les Lettrés de la dynastie des Soung, disent de Thaï-khi tout ce que les King ont dit de Thien, de Chang-ti, etc., je raisonnerais tout autrement que ces gens-ci, et je dirais : « Or, il est clair que