Page:Praviel - Le Roman conjugal de M. Valmore, 1937.pdf/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
83
LE MARI DE LA POÉTESSE

les aventures de Délie, d’Albertine Gantier, de Douai, de telle autre de leurs amies. Dans sa vie déjà longue de théâtre et de coulisses, que de confidences n’avait-elle pas reçues ! Elle les notait, et puis elle les transposait dans ces poésies qui l’inquiétaient si fort, et si faussement, d’ailleurs, car il ne pouvait raisonnablement douter qu’elle l’aimât !

L’année suivante, elle devait connaître une personne, qui viendrait corroborer ces dires, qui collaborerait de toute manière avec elle pour rassurer Valmore. C’était Antoinette-Pauline de Montet, née à la Martinique, mais amenée jeune en France où elle avait épousé le baron Désiré Duchambge d’Ehlbhecq, aide de camp de son père, ancien général de l’armée des Pyrénées-Orientales. Cette union n’avait pas été heureuse. La belle Créole, bientôt séparée de son mari, cantatrice et compositeur de musique, portait au cœur la même blessure que Marceline, car elle fut assez vilainement abandonnée par Auber, qu’elle aimait follement. Elle s’éprit de la muse, trouva en elle un écho à ses désespoirs, et s’attacha à répandre les poésies de son amie en les faisant chanter dans les salons.

Désormais, Pauline Duchambge et sa passion délaissée deviendront l’alibi de Marceline. Ces cris, ces sanglots, ces appels douloureux et mélancoliques, c’est à Auber qu’ils s’adressent. « Ils étaient en prose… Je n’ai fait que les mettre en vers ! »