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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

dien amoureux ? La réalité des faits s’y oppose. Valmore n’était pas assez niais pour ne pas s’inquiéter de la signification secrète de ces poèmes dont le succès littéraire l’enorgueillissait. Si étrange que cela paraisse chez l’époux juvénile d’une femme déjà flétrie, il était jaloux. Il poursuivit Marceline de ses soupçons, de ses récriminations, de ses injures même, et cela durant de longues années, jusqu’à la fin.

Comment se disculpait-elle ? Oh ! c’est très simple. Elle soutenait devant un homme qui se croyait poète, et qui ne l’était pas, l’explication de la littérature. Elle tentait de lui persuader, et elle y parvenait la plupart du temps, que ces vers, ces romances surtout, étaient de purs exercices de virtuosité. Il fallait écrire des compositions mélancoliques dans le goût de cet âge élégiaque, elle s’y était appliquée de son mieux. Elle rêvait la gloire. Les romances l’y conduiraient. Il lui suffisait de trouver des paroles aux mélodies d’Amédée de Beauplan ou d’Édouard Bruguière.

La réponse semblait parfaitement conforme aux prescriptions de L’Art poétique. Comment Valmore ne l’eût-il pas reconnu ? D’ailleurs, si, parfois, quelque vers plus vibrant, quelque strophe plus explicite le poussait à interroger sa femme, à lui demander comment elle avait trouvé telle notation de sentiment, tel cri de passion que tout de même on ne rencontre pas dans les manuels, elle lui racontait