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MALHEURS DE LA JEUNE PREMIÈRE

en parler même à sa famille. Marceline dut faire face à toutes les difficultés navrantes de sa situation, seule, ou peut-être avec l’appui de la grosse Caroline. Elle se confessa à son père, à l’oncle Constant, à ses sœurs : mais quelle aide vraiment efficace en attendre ? Dans les conditions les plus navrantes de dénuement et d’abandon elle donna le jour à un fils, Marie-Eugène, le 24 janvier 1810, après des couches laborieuses et lamentables qui la laissèrent brisée, meurtrie, aphone.

Les mois qui suivirent furent encore plus affreux.

Marceline se rendait compte nettement qu’elle avait cessé de plaire à son bel amant. Il cherchait, ailleurs, des consolations à son mariage raté, à sa triste liaison avec cette pauvre sotte. Elle ne pouvait en douter car il ne se cachait pas.

… Qu’ils sont beaux, les yeux qui te parlaient !
… Ces yeux dont tu m’as dit les charmes,
Laisse-moi les haïr, mais de loin, mais tout bas.
Quels yeux ! Ils sont partout ! Oh ! ne m’en parle pas !
Va-t’en ! Sois heureux !…

Elle le disait, comme cela, en vers ; au fond, elle appartenait à cette race de femmes aimantes et passionnées qui se résolvent malaisément à une rupture. Pour y parvenir, Latouche, déjà roué, eut recours à un stratagème classique. Il feignit d’être jaloux, il lui adressa des reproches amers, l’accabla de