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UNE JEUNE PREMIÈRE

que faire se pouvait. Il lui procura quelques cachets au Théâtre Feydeau. Jusqu’où alla leur intimité ? Il faut poser cette question, sans songer ni à s’en offusquer, ni à la résoudre.

Cette amitié masculine, sans conteste, l’occupa et la soutint quelque temps. Le médecin-poète, de son côté, s’était attaché à cette pauvre frêle fleur, livrée aux coulisses par la folie de sa mère ; il devinait ce qu’il y avait en elle de supérieur aux multiples petites cabotines qu’il connaissait. Il eut la révélation des premiers vers qu’elle fredonnait alors, et, qui devaient tant exciter l’admiration et la vanité de Valmore. Pour composer plus sûrement ses tendres romances, Marceline apprenait la harpe et la guitare, fort à la mode en ce temps-là, et qui convenaient si bien à ses inspirations.

Du côté féminin, elle ne se trouvait pas complètement abandonnée. De cette époque datent, en effet, ses relations avec Alexandrine-Caroline Chevalier de Lavit, issue d’un métis du Cap, épouse du danseur Branchu.

Jamais il n’y eut entre deux amies contraste plus violent. La grosse créole, élève de Garat, était une femme vulgaire, qui avait triomphé jusque-là dans ce qu’on appelait la tragédie hurlée ; mais, en décembre précédent, Spontini lui avait fait créer La Vestale, en modifiant complètement sa manière. Désormais, elle serait, malgré son extérieur commun, une