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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

Quand il regagna Paris, au printemps suivant, il avait renoncé à tout. Vainement lui parlait-on, pour le distraire, de sa rentrée au Théâtre-Français, qu’il avait quitté depuis plus de trente ans. Thiers, Sainte-Beuve, Hugo, qui lui étaient indulgents à cause de Marceline, avaient l’air de s’en occuper… Il savait bien qu’ils n’aboutiraient pas. Il se résignait, sombrement, mais sans trop d’aigreur. Et comme son oisiveté l’inquiétait amèrement, il se déclarait prêt à accepter avec joie n’importe quel travail, n’importe quel emploi, dans l’administration, dans les chemins de fer, avec un rond-de-cuir, ou même une casquette… On peut en sourire, mais, quand on a été Achille, Jupiter, Louis XI ou Buridan, il y a là quelque chose d’héroïque.

Héroïsme qui d’ailleurs, n’aboutissait pas à grand’chose, car, à cinquante-quatre ans, il est difficile pour un artiste de débuter dans un bureau. Personne ne vous croit capable de faire une addition juste, d’arriver à l’heure, de fixer votre esprit sur des intérêts purement matériels. C’est un drame affreux et ridicule.

Pendant ce temps, le ménage se débattait dans une crise inextricable, dont la Révolution de février allait marquer le point extrême.

Quelque temps auparavant, la liquidation d’une faillite théâtrale leur avait fourni un subside inattendu de 400 francs. Ils avaient considéré cela comme une inondation d’argent,