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ÉLOIGNEMENT D’UN VIEIL AMI

représentait pour lui de 1 000 à 1 200 francs de loyer. Or, on lui en offrait 24 000 francs peut-être, 20 000 à coup sûr. Cependant, il ne put s’y résoudre.

Il fallait dire adieu aux bois qui me connaissaient, a-t-il écrit plus tard, aux mousses grises, aux bruyères couleur de giroflée, à l’aménité surtout d’un paysage ravissant que j’ai appris à classer à sa juste valeur, depuis que j’ai revu les horizons du Berry. Chemins de sable ou de mousse, mouvement des coteaux, ombrages séculaires, où vous retrouver ? Quand je pense que j’ai mis en rivalité avec cet Eden, découvert par Chateaubriand et plus poétique que Velléda et René, un pays d’ornières raboteuses, où ne peuvent être en paix ni les rêveries ni les bottes, où chacune de vos semelles déplace un arpent du terrain d’autrui !

Évidemment, il n’était pas homme à vivre en province. Mais dans la paix de l’Île-de-France, à deux pas de Paris dont lui parvenaient les rumeurs, et où il pouvait aller se plonger s’il en ressentait l’envie, il calma peu à peu ses rancœurs. Deux volumes de vers, Les Adieux en 1843 et Les Agrestes, en 1844, témoignèrent de ce nouvel état d’esprit. Son ancienne combativité l’abandonnait. Il devenait meilleur. Il vieillissait.

Au mois d’août de cette année 1844, il avait