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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

bien dans son caractère, d’offrir à Valmore de le lui rendre. Il espérait que le comédien, qu’il considérait toujours comme son obligé et son ami, bondirait à cette proposition pénible, morigénerait son ingrate moitié, agirait enfin efficacement en sa faveur.

Il n’en fut absolument rien. Depuis six mois, Marceline avait eu le temps d’agir, de préparer le terrain. Elle ne cessait de répéter à son mari :

Mon Dieu ! Rien n’est vrai dans cet homme, c’est un joueur de sentiment. Il nous avait fascinés autrefois, mais ce temps même, j’ai eu peur souvent et je m’en fais un crime. Il est bien malheureux, car il est bien haï[1] ?…

Prosper reçut donc la nouvelle lettre de Latouche presque avec soulagement. Enfin ! Il prenait les devants, ce triste sire ! Il communiqua la missive à sa femme, qui en fut amèrement et secrètement ravie. Elle lui répondit aussitôt :

Je voudrais bien, puisqu’on te l’offre, que mon portrait rentrât dans tes mains. Accepte-le naturellement, car je le trouve bien déplacé où il est. D’un autre côté, c’est peut-être difficile pour la vanité qui le possède. Mais tu as une manière agreste de dire les choses qui les rend décisives sans offense. Du reste, il a

  1. Lettre du 6 décembre 1839.