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LE ROMAN CONJUGAL DE M. VALMORE

presque caricaturale de sa jeunesse. Il est des cendres qu’il vaut mieux ne pas remuer.

De son côté, Marceline continuait à mener une vie d’une agitation indescriptible. La moindre halte la torturait. « Je suis morte de dimanche et de tristesse, écrivait-elle à son mari. Je ne revivrai que demain pour courir et pour agir. » On la rencontrait au Magasin pittoresque, où elle plaçait Le Rêve du Mousse, romance ingénue dont Pauline Duchambge avait écrit la musique ; chez Ladvocat, auquel elle donnait un fragment de roman pour le recueil qu’il intitulait Le Livre des Cent et Un ; à La Revue de Paris, où elle publiait un « hommage à Paganini » ; au Journal des Enfants, qui lui imprimait des contes ; chez David d’Angers, qui ébauchait d’elle ce médaillon en cire où elle apparaissait vieillie, anguleuse, un peu masculine, avec un grand nez qui a l’air d’avoir déjà changé de forme ; elle voyait les femmes de lettres en vogue : Sophie Gay et la charmante Amable Tastu. Elle sollicitait pour elle, elle sollicitait pour son mari. Alexandre Dumas, « grand comme Achille, bon comme le pain », lui promettait monts et merveilles ; Victor Hugo, qui pensait à Angelo, à Lucrèce Borgia, à Ruy Blas, lui disait qu’il aurait de nombreux rôles à distribuer ; l’inénarrable Harel, alors directeur de la Porte-Saint-Martin, formulait des offres : mais il déclarait ne pouvoir dépasser mille écus d’appointements. Ah ! s’il réus-