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— Vraiment ! dit M. de H. avec une certaine vivacité, tu es trop bon !

Cependant voyant un nuage d’ennui assombrir davantage la figure jadis animée et gaie, il reprit sans aigreur :

— Qu’est-ce que tu as ? Dis au moins ce que tu as.

— À quoi bon, dit le jeune homme froidement, tu le sais.

— Je ne le crois pas, je ne le croirai jamais.

— Alors qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Il faudrait mentir, n’est-ce pas, pour te faire plaisir ? Cela me fatigue, cela m’ennuie, et puis, au fond, cela ne te tromperait pas, toi.

Il ajouta avec impatience :

— Laisse-moi plutôt tranquille.

C’était la première fois que le baron de M. laissait percevoir si clairement l’irritabilité de son humeur. M. de H. considéra un moment les traits changés, l’expression de tristesse qui altérait la physionomie aimable et le pli volontaire creusé entre les deux sourcils.

— C’est donc sérieux, pensa-t-il avec émotion.

Et il resta quelques secondes rêveur, impressionné et affligé.