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— C’est lui qui a écrit ?

— Non, mais il écrira prochainement, etsi la vie maritime lui déplaît, il le dira.

— Est-ce à maman qu’il écrira, ou bien à… ou bien à qui ?

En même temps, elle fixa sur son père un regard scrutateur.

— Je ne sais pas, mon enfant ; peu importe, du reste ; il écrira, cela suffit.

Et il réfléchit un instant. Il ne regardait plus sa petite fille. Ses yeux erraient devant lui et il apercevait déjà, comme un point blanc perdu dans la verdure, la maison où il avait connu des jours si heureux. De ce passé lointain, rien ne lui restait plus que cet enfant, et aujourd’hui entre la fillette et lui quelque chose avait surgi. C’était comme une mésintelligence sourde et opiniâtre où allait se briser l’ancienne spontanéité confiante d’Isabelle. Jamais avec la mère il n’avait connu cette angoisse-là. Il reprit enfin d’une voix contenue :

— Qu’est-ce que tu penses de moi, Isabelle ? Ne sais-tu pas que c’est Lucien qui a demandé à s’en aller ? Est-ce que je l’aurais fait partir contre son gré en le violentant ? Est-ce cela que tu crois ?